INDEX

Les dits du vendredi – 6

Le 16 Déc. 2016

Tours et détours… les mots de Christian Laborde

TGV  N° 8430. Je descends à la Gare Saint-Pierre des Corps. Je viens en Touraine rencontrer  mes lecteurs, à l’Auberge de la Treille, sise à Saint-Martin-le-Beau. Une rencontre dans une auberge mêle les mots et les mets. C’est pour cette raison que j’ai accepté l’invitation. A l’auberge de la Treille, il y a qui plus est de bons vins : ne serai point déshydraté quand prendra fin ma tchacherie…


Gare de Saint-Pierre-les-Corps
il n’y avait pas de jolis corps
Saint-Pierre non plus n’était pas là
peut-être faisait-il la sieste
dans une chambre de l’hôtel Kyriad
dont la façade
perçée de fenêtres carrées
carcérales
ne raconte aucune histoire au ciel

Sur la place ronde
assiégée par le  vent froid
en ferraille et fil de fer
Don Quichotte et Sancho Pansa
le premier brandit sa lance
le second son estomac

Sur sa famélique haquenée
Quichotte n’a ni selle
ni étriers
pas très bon pour les  roubignoles
Don Quichotte d’ailleurs se fige
mais
noblesse oblige
ne grimace pas

 
Qui dit Tours,  dit  d’abord Paris-Tours. Et je découvre, tapissant les murs d’un couloir de la Nouvelle République d’Indre et Loire, des photos superbes de cette classique sans bosse, chasse gardée des  rouleurs et des  sprinteurs, que Richard Virenque remporte en 2001. Sur l’un des clichés, datant de 1962, je reconnais Jean Stablinski, vêtu du champion du monde, roulant  à l’épaule avec Jacques Anquetil. Dans le roue de ce duo, un coureur costaud : Raymond Mastrotto. Mastrotto, c’est l’air du pays soufflant en Touraine, la langue des gueux au pays des rois. Les mots de Mastrotto sont aussi beaux que ses exploits. En 1967, il remporte l’étape Luchon-Pau. On le félicite. Interrogé à propos du terrible Tourmalet qu’il vient d’escalader, il déclare : « Dans le Tourmalet, je suais tellement que je graissais la chaîne. » La langue de Mastrotto, c’est la langue d’Audiard. Elle se parle toujours dans l’Aubisque,  jamais à Roland Garros.

Qui dit Tours, dit aussi Jean Royer, maire de la ville pendant  trente-six ans, de 1959 à 1995, également   ministre du commerce et de l’artisanat du gouvernement de Pierre Messmer  et, surtout, candidat chahuté à l’élection présidentielle de 1974. Chahuté où ? A Toulouse pardi, lors d’un meeting où, à l’ l’heure de la « révolution sexuelle », Jean Royer prêchait contre vents et marées les valeurs traditionnelles chères aujourd’hui aux pousseurs de poussettes à triplés de la Manif pour tous.  A Toulouse donc, pendant qu’il tentait de se faire entendre, une étudiante vint se placer devant Jean Royer et, retirant son chemisier, lui présenta ses seins, quarante ans avant les Femen. A Toulouse, les femmes ont toujours été les premières sur les barricades. Rappelons que la pierrière dont la charge tua Simon de Montfort, le 25 juin 1218 lors du siège de Toulouse, était manœuvrée par des femmes.

Christian Laborde
christianlaborde.com


A lire également

Laisser un commentaire

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *