Voyager, c’est aussi rapporter dans ses bagages des expressions venues d’ailleurs qu’on rêverait de traduire au français. Encore que… Pas toutes ! Comme on sait que vous adorez la bourlingue, pendant les trois prochaines semaines, nous allons successivement vous emmener en Allemagne, en Corée et en Finlande. C’est parti ? Accrochez vos ceintures…
À tout voisin, tout honneur. Si tout le monde n’est pas ultra fan de la langue de Goethe, il faut cependant laisser à la saucisse ce qui revient à la saucisse ! Oui, vous l’aurez compris, en Allemagne, si vous devez apprendre un mot, un seul, ce sera WURST, saucisse ! Voici dix expressions qu’on envisage très sérieusement de rapatrier illico. Ils n’auront pas l’Alsace, la Lorraine et la saucis… Oups, enfin vous saucissonnez, euh saisissez l’idée…
Löcher in die Luft starren
Littéralement, « Fixer du regard les trous dans l’air ». Equivalent fransouzen de « Bayer aux corneilles » (eh non, on ne dit pas « Bailler aux corneilles » ! Bayer signifie « avoir la bouche ouverte » et toc !!!). Et au lieu de se prendre la tête sur « bayer » ou « bailler », franchement, c’est mieux de dire « fixer du regard les trous dans l’air » qui est mignon comme trou, euh comme tout, enfin vous voyez, quoi…
Himmel, Arsch und Zwirn
Ciel, cul et fil ? Traduction, bitte (de circonstance, on dirait) ? L’équivalent de l’autre côté du Rhin serait plutôt Bordel de Merde, ce qui n’est pas très meuh-meuh, diront les grosses vaches et les autres. Tandis que, « Ciel, cul et fil », de suite, ça a un côté primesautier, bucolique et pour tout dire, charmant. Char-mant-offen !
Aus den Latschen kippen
Le « tomber dans les pommes » teuton (de circonstance toujours), qui signifie littéralement « basculer hors de ses pantoufles ». Avouons que l’image est parlante. « T’as vu le dernier échange entre Trump et Hilary ? » « La vache, ouais, c’était violent, j’en ai basculé dans mes charentaises » aurait dit François Hollande à Angela pour faire genre. Ce à quoi la Merkel aurait répondu « Ajjj, meine petiteuh François, toujours aussi sensible, ajjjj ». Mais surtout, que ça reste « off ».
Er spielt die beleidigte Leberwurst
Comprendre qu’en allemand, saucisse, charcuterie = émotion garantie. Tu fais du boudin, ou tu fais l’andouille ? Eh bien, en Allemagne, « il fait la saucisse de foie insultée ». On se dit qu’à moment donné, le créateur d’expressions à la con des spountz, il a joué les associations hasardeuses, warum « faire sa saucisse de foie insultée », c’est vraiment nous prendre pour des jambons ! On nous rapporte que l’expression serait danoise à l’origine. Mais on s’en fout un porc (export ?), pardon, un peu…
Lass die Kirche im Dorf
La dernière fois qu’un pote marseillais nous a raconté l’histoire de la sardine qui bouchait l’entrée du port, on a répondu doctement et goethement, « Laisse l’église dans le village » et aussitôt le mec a arrêté net d’en faire des tonnes. Non mais ! La phrase qui calme. Ou pas.
Du gehst mir tierisch auf den Keks
L’autre, elle m’énervait. Alors, ni une ni deux, je lui ai balancé « Tu me marches animalement sur le biscuit » et je peux te dire qu’elle a baissé d’un ton. Vénère j’étais (ce qui, au passé simple devient « Vénère, j’éture », avec l’âge, ça vient toujours… Ok je sors).
Alles hat ein Ende, nur die Wurst hast zwei.
Notre chouchou. Encore de la saucisse ! Mais cette fois, émotion oubliée, saucisse = philosophie et sagesse. « Tout a une fin, seule la saucisse en a deux ». Kant et Kierkegaard l’auraient pas reniée celle-là !
Nur die Harten kommen in den Garten
Que le philosophe Denis Brongniart traduirait par « À la fin, il n’en restera qu’un ». Mais qui littéralement serait plutôt « Seuls les forts entrent dans le jardin ». Ou seul le plus fort gagne. Quand Jason Statham (eine cadeau für meine beau-frère unique und préféré !) est revisité façon Nicolas le Jardinier, whaouuuu…
Klappe zu, Affe tot
Ferme le couvercle, le singe est mort ! La fin des haricots à la française ? Imagine :
– Chéri, faut qu’on cause, il faut fermer le couvercle, le singe est mort !
– Mais quelle truie !
– Ah, ne fais pas ta saucisse de foie insultée !
– Tu sais que tu commences à me marcher sur le biscuit, toi ?
Quand les disputes à la sauce allemande nous font rêver…
Ein Erbenzähler sein
Chez nous, on parlerait de « coupeur de cheveux en quatre », ou « enculeur de mouche » pour les moins raffinés (si, si, y en a, on a les noms !). Côté Bavière, on appelle ça gentiment un « compteur de petits pois ». Quelle classe, tout de même !
Alors, les mioches, vous voyez que c’est sympa l’allemand, finalement ? Aux profs d’allemand, au lieu de nous gueuler dessus pour les traductions approximatives, remerciez-nous plutôt de motiver les gamins à prendre spountz en LV1, 2 ou 15… La semaine prochaine, pourquoi vous allez rêver de parler coréen, il nous tarde déjà, pas vous ?
Enfin bon, moi je dis ça, je dis keine…
Grapunzel Hastöyche
Sehr gut, meine Grastoyche préférée!
MGR
Danke très shön, Marian!!! Enfin, genre, quoi…
Une toute petite erreur d’orthographe à la dernière expression: ce n’est pas Erbenzähler (compteur d’héritiers), mais Erbsenzähler, compteur de petits pois.
et encore un, le plus commun: Das ist mir Wurst (Das ist mir Wurscht), c’est une saucisse pour moi. En bon français: je n’en ai rien à foutre.