D’ici cette échéance, l’Agglo compte produire 2.600 nouveaux logements par an, dont 50% de logements sociaux. L’objectif est également de recentrer l’offre dans l’intérieur des terres. Le budget consacré à ce nouveau programme s’élèvera chaque année à 17,5 millions d’euros.
Ce samedi 10 avril, le programme local de l’habitat (PLH) de la Communauté Pays Basque a été adopté en conseil communautaire avec 97% de votes favorables. Dans les grandes lignes, il « prévoit une augmentation de 50% des logements sociaux, une forte baisse de la construction sur la côte au profit du Pays basque intérieur et la diminution de la part de résidences secondaires », explique l’agglomération, qui parle d’une « démarche totalement inédite au Pays Basque ».
Le PLH a été élaboré sous la responsabilité de Roland Hirigoyen, maire de Mouguerre et vice-président de l’agglomération en charge du logement, après consultation des 158 communes que compte la CAPB. « Près de 140 réunions ont ainsi été organisées, ainsi que deux séminaires de concertation ayant réuni jusqu’à 150 élus et acteurs du logement (bailleurs, promoteurs, associations) à Mouguerre puis à Mendionde », précise celle qui reste à ce jour la plus grande intercommunalité de France.
« Construire moins mais mieux »…
Concrètement, le PLH table sur une production annuelle de 2.600 nouveaux logements, pour moitié des logements sociaux. « Environ deux tiers de ces logements seront à louer et un tiers seront en accession sociale à la propriété », ajoute la CAPB, qui compte notamment s’appuyer sur « des dispositifs innovants comme le bail réel solidaire ».
Pour mener à bien ce programme, il en coûtera chaque année à l’agglo la coquette somme de 17,5 millions d’euros. L’ampleur en est donc bel et bien inédite, quoiqu’en rapport avec l’importance de l’intercommunalité.
On le sait : le logement est l’un des dossiers politiques les plus délicats en Pays basque. Sur l’agglomération, une habitation sur 5 serait une résidence secondaire, taux qui atteint 50% dans certaines communes comme Guéthary. Au total, cela représenterait 41.000 des 200.000 logements du territoire. L’ambition du PLH est de réduire cette part des résidences secondaires, qui conduit à de telles hausses de prix que la location à l’année ou la propriété deviennent inaccessibles au commun des mortels.
Aujourd’hui, 73% des logements sont commercialisés sur le marché classique, mais seuls 28% des ménages seraient en capacité de suivre financièrement. Les prix des biens ont grimpé de 20% entre 2015 et 2018, et la tendance est bien loin de s’être inversée depuis, en dépit d’une offre en constante progression… Il n’a en effet échappé à personne que les constructions se multiplient, ce qui n’est d’ailleurs pas du goût de tout le monde. Côté logements sociaux, il n’y en aurait qu’un de disponible pour 6 demandes, avec un temps d’attente moyen de 22 mois, soit 8 de plus que dans le reste du 64 et de l’Hexagone.
« On sait que les résidences secondaires ne sont pas issues de constructions neuves mais sont, à plus de 90%, le fruit de ventes de biens existants. C’est pourquoi, pour diminuer cette part de résidences secondaires, les réponses les plus pragmatiques ont été privilégiées, création de logements sociaux et réhabilitation de logements vacants en Pays Basque intérieur notamment », expose l’agglo, qui souhaite aussi « aller plus loin » sur le dossier de l’encadrement des meublés de tourisme.
La réhabilitation des logements vacants ne serait pas qu’un simple pis-aller, puisque 14.000 nouvelles habitations de ce type devraient être disponibles dans l’agglo d’ici 2026. On peut donc parler de nécessité, alors que le nombre de résidences secondaires continue de progresser structurellement : il devrait y en avoir 10.000 de plus qu’aujourd’hui en 2026.
Rééquilibrer la production de logements…
L’autre grande ambition du PLH voté samedi dernier, c’est le rééquilibrage de l’offre en faveur de l’intérieur des terres, les littoraux étant presque arrivés à saturation. L’agglo estime que sur la période 2021-2026, la production de logements doit pour cela diminuer de 19% à proximité du littoral, et grimper de 70% dans le Pays Basque intérieur (par comparaison avec la période 2010-2018). Au-delà de ce déséquilibre, on peut aussi noter qu’actuellement, les seules communes de Bayonne et d’Anglet concentreraient 3 nouveaux logements créés sur 4…
Ce PLH, s’il se veut réaliste et ambitieux, ne pourra naturellement pas résoudre à lui seul l’épineux problème du logement dans l’agglo. Il ne suffira d’ailleurs pas à mettre celle-ci dans les clous de la fameuse loi SRU qui, on le rappelle, impose 25% de logements sociaux dans les communes d’ici 2025. Cette proportion ne serait actuellement tenue qu’à Bayonne.
L’Agglo précise donc que les efforts supplémentaires à fournir viendront des communes, qui peuvent agir à leur niveau via les plans locaux d’urbanisme, la délivrance des permis de construire et, pour les communes du littoral, en surtaxant les résidences secondaires (avec par exemple une taxe d’habitation majorée de 35% à Bayonne, taux qui pourrait bientôt passer à 60%, soit le maximum autorisé).
Cette « réponse fiscale », qui n’est pas forcément la panacée pour tout le monde (pénaliser à l’excès les propriétaires de résidences secondaires, qu’ils soient ou non du cru, pourrait avoir un effet sur leurs dépenses, et donc sur l’activité économique locale), est cependant l’un des rares leviers auxquels peuvent recourir les autorités, qui précisent que pour l’ensemble des ventes réalisées, l’usage du droit de préemption coûterait approximativement… 400 millions d’euros. Bien loin du budget de ce PLH, pourtant « un record ».
Un problème de gentrification…
Depuis quelques temps, ce dossier du logement suscite dans la population des colères parfois plus compréhensibles que véritablement fondées, alors qu’on commence à voir refleurir des slogans contre « l’envahisseur » parisien, comme l’ont par exemple confessé les maires de Bidart et de Saint-Jean-Pied-de-Port.
Or la plupart des élus souhaitent rappeler que nous sommes moins en face d’un problème d’origine que de gentrification, c’est-à-dire d’embourgeoisement de certaines zones et communes prisées. Le problème pourrait même toucher plus massivement le Pays Basque intérieur dans les prochaines années… Et la crise du covid semble accélérer la tendance, également observable sur le littoral landais.
En d’autres termes, plutôt que de se focaliser sur l’origine des arrivants, les élus souhaitent avant tout favoriser l’accession de ceux qui vivent et travaillent sur place à un premier logement.
Outre que les biens dits « secondaires » sont généralement vendus (ou mis en location saisonnière) par des locaux, ils ne le sont pas forcément à des Parisiens, eux-mêmes victimes du même phénomène à bien plus large échelle. On compte d’ailleurs aussi de nombreux acquéreurs étrangers ou d’autres régions françaises.
Il est bon de rappeler que, les « Parisiens » (et par extension les habitants des plus grandes villes françaises) sont, dans leur écrasante majorité, issus de familles de province, qu’elles soient bretonnes (comme autrefois Bécassine), nordistes… ou du Pays Basque, dont beaucoup d’enfants ont été contraints d’émigrer ailleurs pour se faire une situation…
En résumé, si ce PLH ne règlera pas tout et que certains auraient sans doute aimé aller plus loin, on ne peut nier qu’un effort notable a tout de même été fourni en termes de budget. En espérant que ce nouveau programme porte ses fruits… On notera, enfin, que le PLH 2021-2026 doit encore être transmis aux services de l’État, puis faire l’objet d’un vote définitif au second semestre.
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Bonjour,
Analyse intéressante mais vous oubliez de parler d’une conséquence certaine de ce plan vis à vis du plan de déplacement urbain (plutôt plan de mobilité maintenant!) qui a des objectifs ambitieux en matière de report modal de la voiture individuelle vers les modes de transports doux et collectifs. Si l’activité économique ne suit pas à l’intérieur du Pays Basque, comment atteindre ces objectifs si on construit de plus en plus loin des zones d’activités économiques (travail, commerces, etc)? Bref, qui parle encore de l’impact environnementale de l’ensemble de ces planifications (alors qu’on a des objectifs de neutralité carbone à atteindre)?
Bonjour
Il faut tout de même rappeler que seules les communes en zones tendues peuvent appliquer la taxe sur les résidences secondaires, ce qui est loin d’être le cas pour un grand nombre de communes du Pays Basque intérieur.
Par ailleurs, favoriser la création de logements dits sociaux doit être accompagné de services publics, services de mobilité, et/ou de création de nouveaux bassins d’emplois.